Par Galerie Nicolas Lenté
Mobilier, Tableaux et Objets d'Art de la Haute Epoque au XVIIIe
Vierge à l’Enfant au chardonneret
Ateliers de Metz, Lorraine, vers 1330
Pierre calcaire sculptée en ronde-bosse avec restes de polychromie
Hauteur: 61 cm
Tête de la Vierge anciennement cassée et recollée, manque la main gauche de la Vierge, manque une partie de la bride du manteau. Tête de l’enfant cassée recollée, manque une partie du pied gauche de l’enfant.
La sculpture de la Vierge à l’Enfant que nous présentons appartient par ses caractéristiques stylistiques au corpus bien spécifique de la statuaire lorraine, où le culte marial prends de l’ampleur à la fin du XIIIème siècle, afin d’arriver à son apogée artistique dans les années 1320-1340. Par ses dimensions modestes, elle s’inscrit dans la statuaire de dévotion privée, la pratique religieuse intimiste étant de plus en plus prisée.
Debout, légèrement déhanchée, la Vierge porte l’enfant Jésus sur le bras droit. Le visage aux traits juvéniles en forme d’écu (spécificité ...
... lorraine) est encadré de délicates mèches ondulées, animé par des yeux en amandes étirés, nez large et court et une bouche aux lèvres pincées. Sur la tête de la Vierge repose une couronne à fleurons trilobés sur un voile court.
Marie est vêtue d’une robe et d’un ample manteau qui partant de son épaule gauche se transforme en tablier au-dessus des genoux, révélant sa taille soulignée par une ceinture serrée qui crée des plis en poche de la robe sur la poitrine. La présence de la ceinture délicatement sculptée avec sa boucle et son extrémité retombante porte une signification importante dans les attributs du culte marial, la ceinture étant le symbole de la chasteté.
Le mouvement du manteau crée des chutes inégales des pans de draperies latérales. A droit sous l’enfant Jésus ses plis tuyautés descendent richement en cascade. A gauche c’est la flexion du bras qui crée une chute aux plis plus élargis.
Les drapés du tablier creusés en arrondi sont suivis en décalé par quelques plis en bec crées par le mouvement du genou gauche.
Le drapé en tablier du manteau introduit un important élément transversal dans la silhouette s’inscrit dans les recherches graphiques et plastiques de ce tiers premier tiers du XIVème siècle
Les plis de la robe en partie basse sont plus profondément creusés, les pans du manteau habilement dégagés par le sculpteur font apparaitre les chaussures pointues de la Vierge.
Le mouvement enveloppant du manteau incite à tourner autour de l’œuvre et fournit une multitude de points de vue d’autant plus que l’œuvre est exécutée en ronde bosse.
L’enfant Jésus est vêtu d’une tunique dont le col ouvert permet d’apercevoir un chemisier boutonné. Le visage rond aux yeux légèrement bridés est encadré de petites boucles très serrés d’où se dégagent ses grandes oreilles. Ces mèches enroulées imitent une toison d’agneau constituant ainsi une référence a la Passion
Dans un geste affectueux il tire de sa main gauche la bride qui attache le manteau de la vierge, le sculpteur créant ainsi une interaction affective entre deux protagonistes.
Dans sa main droite Jésus tient un chardonneret qui lui mordille le pouce. Symboliquement la présence de cet oiseau annonce le sacrifice à venir du Christ lors de la Passion[ et le sang qui sera versé. Un outre cet oiseau mange des graines de chardon dont les épines rappellent la couronne du Christ.
La douceur du visage de la Vierge, l’attitude vivante et affectueuse de l’Enfant, la souplesse et l’agencement des drapés, les détails vestimentaires mis en avant par le sculpteur participent à rendre notre sculpture à la fois esthétique et émouvante et en font un bel exemplaire de la statuaire gothique de Lorraine.
L’enfant porté à droite est plutôt rare dans l’iconographie lorraine (il est habituellement porté à gauche) ce qui demande au sculpteur un travail supplémentaire afin d’inverser les positions et ordonner les drapés de gauche à droite. Il en existe cependant d’autres sculptures lorraines avec l’enfant à droite répertoriées dans l’ouvrage de référence sur la statuaire de Lorraine au XIVème siècle réalisé par le professeur J. A. Schmoll (parmi lesquelles la Vierge à l’Enfant du Musée de Cluny (inv. 18763, cat N° 114)). Cependant l’historien de l’art ne donne pas d’explications particulières sur les dispositions de l’enfant, nous pouvons supposer seulement qu’il s’agirait probablement d’une demande spécifique du commanditaire par rapport à un emplacement choisi et angle de vue désiré.
On peut parfaitement rapprocher l’œuvre que nous présentons d’une Vierge à l’Enfant réalisée en Lorraine vers 1340 et conservée au Musée national de Bavière à Munich, qui possède la même particularité d’avoir l’enfant à droite.
Œuvres en rapport :
• Vierge à l’Enfant, Musée national de Bavière à Munich (inv 65/278), pierre calcaire, h. 64,5 cm, vers 1340, atelier de Metz, (reproduit cat N° 167)
• Vierge à l’Enfant, Musée Schnutgen, Cologne, pierre calcaire, h. 104 cm, vers 1330, atelier de Metz, (reproduit cat N° 145)
• Vierge à l’Enfant, l’abbaye de Kaisheim (Bavière), Allemagne, h. 80 cm, atelier de Metz vers 1330 (cat. N° 361)
Bibliographie : J. A. SCHMOLL, gene. Eisenwerth, Die Lothringische Skultur des 14. Jahrunderts, Michael Imhof Verlag, D-36100 Petersberg, 2005
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