Par Galerie Nicolas Lenté
Mobilier, Tableaux et Objets d'Art de la Haute Epoque au XVIIIe
Portrait de Judith Guiguer, baronne de Prangins,
par Nicolas de Largillièrre (Paris, 1656-1746)
Paris, début du XVIIIème siècle, vers 1715
Huile sur toile: h. 80 cm, l. 63 cm
Cadre d’époque Louis XIV en bois doré et sculpté de feuilles de chêne.
Encadré : h. 100 cm, l.83 cm
Nous remercions Monsieur Dominique Brême, ancien directeur du musée du Domaine départemental de Sceaux et spécialiste de Nicolas de Largillièrre, de nous avoir aimablement confirmé l'attribution par un examen de visu de ce portrait qu’il date autour de 1715 et qu'il inclura dans le catalogue raisonné de l'artiste en cours de préparation.
Notre portrait est une version autographe avec variantes d’un portrait à mi-jambes de la Baronne de Prangins, peint par Largillière autour de 1713 (voir « œuvres en rapport »). Sur ce grand portrait la baronne est coiffée à la Fontanges selon la mode en vigueur depuis la fin du XVIIème siècle.
La disparition progressive des "cruches" ...
... (des petites boucles qui encadrent le front) au profit d’une coiffure qui dégage le front vers 1715 a sans doute incité la jeune femme de commander une nouvelle version de son portrait afin que Nicolas de Largillierre puisse l’immortaliser en accord avec le nouveau style de l’époque.
Dans un cadre palatial témoignant avec ostentation de la richesse du modèle, la jeune femme est portraiturée sur fond d’une large draperie de velours vert.
Regardant le spectateur en face, ses yeux noirs d’un éclat extraordinaire anime son visage au teinte pale et laiteux contrastant avec ses joues légèrement fardées et sa bouche aux lèvres rouges.
Les cheveux poudrés, relevés en chignon peu volumineux, elle arbore une coiffure plus sobre et naturelle qui remplace les hautes fontanges de la fin du XVIIème siècle. Quelques fleurs sont piquées au sommet de sa tête, et une grosse perle attachée à un rubis rouge étincelle de mille éclats faisant pendant avec les bijoux qui ornent ses manches entaillées.
Sa robe de satin de couleur crème aux tonalités froides ne fait que mieux ressortir les chairs nacrées de sa gorge. La masse des dentelles finement dessinées de son chemisier dissimule délicatement sa poitrine alors qu’un large œillet rouge piqué dans son décolleté attire le regard du spectateur par le contraste avec la blancheur de ses carnations. Sa taille est ceinte par un corselet en velours amarante à broderie d’or retenu par des agrafes de pierres précieuses. Les manches relevées et entaillées permettent de découvrir son chemisier blanc.
Avec son aisance habituelle Nicolas de Largillierre compose les volumes des étoffes en jouant avec des textures: l’éclat métallique du satin est magnifié par les plis cassants et raides, tandis que le scintillement doré enflamme des crêtes du velours vert. Son pinceau énergique et confiant, sa parfaite connaissance des interactions de chaque matière avec lumière permettent d’obtenir un rendu époustouflant plus vrai que nature.
Œuvres en rapport :
• Nicolas de Largillierre, portrait de la baronne de Prangins, h. 140 cm, l. 110 cm, vers 1713
Musée national suisse, Château de Prangins, ex collection du Metropolitan Museum of New York (entre 1921-1983), pendant du portrait du Baron de Prangins, conservé également au Château de Prangins.
• Nicolas de Largillierre, portrait de la baronne de Prangins, h. 80 cm, l. 64 cm, collection Paul Cailleux (1884-1964), prêté pour l’exposition Nicolas de Largillierre, Grands Palais, Paris, 1928 sous le numéro 81, acquis par l’Ecole des Beaux-Arts du Caire (Egypte) avant 1930 (publié sans mentionner la provenance Cailleux dans la Gazette des Beaux-Arts, volume 8, juin 1930)
Baronne de Prangins, Judith Guiguer, née Van Robais (Abbeville, 1694- Paris, 1748) vient d’une famille d’origine flamande. Suite à une invitation de Jean Baptiste Colbert, son grand-père Josse van Robais (1630-1685), originaire de Courtrai s'installe en 1665 à Abbeville afin de fonder une manufacture de drap fin, qui reçoit le titre de manufacture royale. Son fils Josse Van Robais (1662-1733) devient à son tour le directeur de la manufacture et continue l’activité familiale. Judith Van Robais épouse en 1713 Louis Guiguer (Lyon, 1675 – Paris, 1747) banquier parisien d’origine suisse, fondateur en 1703 de la banque Tourton et Guiguer. Il fait fortune grâce au système de Law et dans les opérations commerciales de la compagnie des Indes. A la recherche d’un titre de noblesse à ajouter à son immense fortune Louis Guiguer acquiert la baronnie de Prangins située sur le lac Léman et y fait construire un château dans lequel les époux Guiguer ne vivront pas, privilégiant compte tenu de l’activité financière de Louis Guiguer rester à Paris.
A l’époque de la Régence, il courut sur la Baronne de Prangins un quatrain dont s’amuserent fort les gens de cour à l’occasion de la visite en 1717 de Pierrele Grand de Russie à Paris qui serait épris de charmes de la jeune femme.
Le Tzar aime les femmes fortes
Si Prangins ne lui déplait pas
C’est que ses opulents appas
Ont grand’peine à passer les portes
Nicolas de Largillièrre (Paris, 1656-1746)
Nicolas de Largillièrre, né le 2 octobre 1656 à Paris, où il est mort le 20 mars 1746, est un peintre français. D’origine flamande bien que né à Paris, il passe son enfance à Anvers mis en apprentissage auprès du peintre -paysagiste Antoine Goubau. En 1673 il se rend en Angleterre où il travaille comme assistant dans l'atelier du portraitiste Peter Lely pendant plusieurs années. Largillierre découvre à Londres l’art du portrait et assimile les belles leçons du successeur britannique d’Antoine van Dyck. A son retour en France il est agréé à l'Académie Royale en 1683 et sera reçu trois ans plus tard « peintre de portraits et d'histoire » sur présentation du Portrait de Charles Le Brun.
Il est l'un des portraitistes les plus réputés des XVIIe et XVIIIe siècle. La longue carrière de Nicolas de Largillièrre s'étend sur les règnes de Louis XIV et Louis XV, au cours desquels il s'impose comme un portraitiste de premier plan. Ses effigies féminines, notamment, frappent par leur caractère introspectif et leur richesse décorative.
Bibliographie: Dominique Brême, Nicolas de Largillierre, 1656-1746, cat. exp. Paris, Musée Jacquemart-André, Paris, éditions Phileas Fogg, 2003
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