Par Richard Redding Antiques
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Pendules et objets d'art d'exception XVIIe-XIXe siècle
Une très belle urne en fonte patinée verte de la fin du XIXe siècle, d'après un modèle de Claude Ballin pour les jardins de Louis XIV au château de Versailles. Cette urne en forme de vase est surmontée de chaque côté d'un putto ailé aux cheveux bouclés qui, les mains sur les joues, repose ses bras sur le rebord du vase entouré d'un ruban tout en se regardant l'un l'autre. Chaque putto est assis sur une poignée en forme de tête de lion à plumes avec un anneau dans la bouche. Le col de l'urne en forme de vase est orné d'une bordure en osier au-dessus du corps principal, centrée par un médaillon circulaire renfermant un faisceau de baguettes entouré d'une branche de laurier. Le corps cannelé inférieur de l'urne repose sur un pied circulaire à gradins posé sur une base carrée qui repose elle-même sur un socle rectangulaire surmonté au centre d'une couronne de feuilles de laurier sur une base carrée à gradins.
France, vers 1890-1900
Hauteur 163 cm, largeur 84 ...
... cm.
Cette magnifique urne en fonte de la fin du XIXe siècle est inspirée d'un modèle d'urnes conçu par Claude Ballin (1615-78) pour les jardins nouvellement aménagés de Louis XIV au château de Versailles, où six d'entre elles étaient à l'origine placées sur la terrasse sud du parterre nord entre 1667 et 1669. Ballin, surnommé « le Grand Ballin », fut nommé maître orfèvre et Orfèvre Ordinaire du Roi et fut responsable d'une grande partie de la décoration intérieure de Versailles. En 1665, ou peu avant, il fut chargé de concevoir un ensemble de vases ou d'urnes pour les grands parterres nord et sud nouvellement créés, qui avaient été récemment conçus et aménagés par l'architecte paysagiste royal André Le Nôtre (1613-1700).
Pour la somme de 7 200 livres, en décembre 1665, le sculpteur-fondeur du Roi Ambroise Duval avait achevé la création de six urnes en bronze de ce modèle, chacune mesurant environ 85 cm de haut, qui avaient été coulées à partir de modèles en cire, d'après le dessin original de Ballin. Les sculpteurs François ou Michel Anguier et Nicolas Legendre avaient été chargés de créer les modèles en cire, dont quatre avaient été fournis par Legendre et deux par Anguier. Il est presque certain que le modèle de l'urne actuelle est celui auquel Madeleine de Scudéry fait référence en 1669 dans La Promenade de Versailles, où elle écrit : « sur la balustrade du premier parterre », parmi lesquels « ceux où l'on voit de petits enfants appuyés sur les anses des vases, qui, avec une attention enfantine, semblent admirer les fleurs dont ils sont remplis ».
L'urne, qui se distingue par une paire de putti se faisant face, assis sur des masques à tête de lion à plumes, fait partie d'une série de dessins réalisés par Ballin pour les vases en bronze destinés aux jardins de Versailles. D'autres modèles comprenaient des poignées en forme de têtes de satyre et de tête de loup, tandis qu'un autre ensemble présentait des poignées en forme de sirène ainsi que des poignées soutenues par deux visages grimaçants. Un tableau d'Étienne Allegrain (1644-1736), réalisé entre 1688 et 1695 (au Musée national des Châteaux de Versailles et de Trianon), offre une vue partielle du parterre nord, où l'on peut voir dix vases, dont deux du même modèle que celui-ci, flanqués d'autres urnes, notamment celles dont les anses sont formées par une tête de satyre ou décorées d'une tête de loup. Une autre paire a des anses en forme de sirène ; deux sont décorées d'anses en forme de médaillon, tandis qu'une autre paire présente des anses soutenues par deux visages grimaçants.
Le travail de Claude Ballin à Versailles reflète la synthèse entre l'art et l'architecture qui a défini l'ambitieuse expansion du domaine royal sous Louis XIV dans les années 1660 et 1670. Bien que principalement connu comme orfèvre du roi, la contribution de Ballin à la sculpture et au design a été essentielle à la décoration du palais et de ses jardins. Ses créations pour un ensemble d'urnes monumentales en bronze ont servi de points centraux dans la géométrie strictement ordonnée du paysage d'André Le Nôtre. Les urnes alliaient fioritures ornementales et précision architecturale, intégrant souvent des motifs classiques tels que des feuilles d'acanthe, des masques, des guirlandes et, comme on le voit ici, des putti, figures symboliques de l'abondance et de la vitalité.
Le dessin de Ballin pour notre modèle, ainsi que quatre autres, a ensuite été reproduit dans des gravures de Jean Le Pautre (1618-82) au cours de la décennie suivante, avec des tirages individuels datés de 1672 et 1673. Le Metropolitan Museum de New York possède un dessin à la plume et à l'encre de Chine réalisé par un artiste inconnu en 1673 ou peu après, d'après la gravure de Le Pautre. Il est intéressant de noter que la gravure de Le Pautre montre un emblème royal sur le médaillon central ornant le corps de l'urne. Cet emblème a été retiré en 1794, pendant la Révolution française, et à sa place, le sculpteur Boichard a modelé sur un côté un faisceau, comme on le voit ici. Les faisceaux sont composés d'un faisceau de tiges entourant une tête de hache simple ou double avec des sangles. C'était l'emblème du magistrat romain supérieur et il est devenu un symbole de la justice personnifiée.
Grâce aux gravures de Le Pautre, les urnes de Ballin sont devenues extrêmement populaires dans toute l'Europe et sont connues dans de nombreuses copies des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles, parmi lesquelles on trouve des versions en terre cuite, en marbre et en bronze. Parmi ces exemples, on trouve une paire de vases en bronze qui se trouvent dans le parc de Kingston Lacy dans le Dorset (qui appartient aujourd'hui au National Trust), un somptueux manoir du XVIIe siècle qui a été réaménagé au cours de la première moitié du XIXe siècle par Sir Charles Barry (qui a également réaménagé le Parlement à Londres).
En 1851-1852, dix-huit autres vases en bronze inspirés des dessins originaux de Ballin ont été coulés par l'ingénieur et fondeur français Christophe-François Calla (1802-1884) et livrés à Versailles pour compléter la série de vases originaux réalisés d'après les modèles de Ballin. Chacun portait le nom de Calla et était daté de 1852. Si la plupart étaient des reproductions des urnes réalisées pour la terrasse nord du parterre sud, trois des modèles, dont le nôtre, correspondaient à ceux de la terrasse sud du parterre nord. Le bronze utilisé par Calla pour cette commande à grande échelle provenait d'une tête de cheval colossale, elle-même réplique d'une statue équestre de Louis XIV coulée en 1831 par Auguste-Jean-Marie Carbonneaux d'après un modèle de Jean-Baptiste Debay pour la ville de Montpellier. Peu de temps après, plusieurs autres versions de notre modèle ont été réalisées en fonte, un matériau rendu possible grâce aux progrès de la révolution industrielle et dont la production était moins coûteuse que celle du bronze ou du marbre, tout en étant tout aussi durable.