Une console Louis XV en fer forgé

... très exubérante, connue sous le nom de console d'apparat, est un exemple rare d'un type de ferronnerie associé à la Provence, dans le sud de la France, et en particulier aux œuvres réalisées dans le Comtat Venaissin, dont des exemples similaires sont illustrés dans le livre d'Alain Renner, « Mobilier de Métal de l'Ancien Régime à la Restauration », 2009. Inspirées de pièces similaires réalisées par des ébénistes en bois sculpté et doré, les consoles d'apparat en fer forgé sont apparues comme des créations ambitieuses réalisées par des artisans appartenant à la corporation des serruriers-ferronniers, qui étaient plus habitués à réaliser des œuvres complétant des projets architecturaux.
Les serruriers-ferronniers s'inspiraient du langage architectural. Parallèlement, ils s'inspiraient des créations d'ornementistes tels que Gabriel Huquier (1695-1772), dont le « Nouveau Livre de Serrurerie » comprenait des modèles de consoles similaires à ceux que nous voyons ici. Les serruriers-ferronniers ont réussi à interpréter les styles baroque, rococo et plus tard néoclassique et leurs différents motifs en forgeant le fer pour lui donner une nouvelle expression, ce qui a donné lieu à ce qui a été décrit comme une « stylisation du style », comme le note l'article « À la recherche des meubles de fer du XVIIIe siècle français », dans « Connaissance des Arts », 1957. La création de telles pièces à partir d'un métal dur et robuste, mais néanmoins plein de caractère, était un procédé ancien dans lequel le fer était chauffé à une température extrême. Le métal chauffé au rouge était ensuite battu et façonné tandis que la tôle était poussée sur des matrices sculptées. Il était ensuite ciselé et enfin doré. Les deux métaux étaient ensuite assemblés à l'aide de vis, de rivets et de cales.
Une fois poli, peint, doré, argenté ou recouvert de tôle repoussée, le fer forgé prend une nouvelle vitalité, pleine de chaleur et de richesse, qui rivalise avec les œuvres en bois sculpté ornées de montures en bronze doré. De plus, les meubles en fer forgé offraient une durabilité que le bois ne pouvait offrir. Ce matériau, utilisé dans l'ameublement, est donc devenu un élément sophistiqué et rare des intérieurs luxueux français à partir du début de la période Louis XV. De plus, la résistance physique du fer forgé a conduit à privilégier les consoles fixées au mur, jouant sur le contraste entre le poids du plateau en pierre et la légèreté du design ajouré, une caractéristique que le bois sculpté et doré pouvait rarement offrir.
Seuls deux centres en France au XVIIIe siècle semblent s'être spécialisés dans la création de telles œuvres. L'un se trouvait à Paris et l'autre dans le sud de la France. Les pièces fabriquées à Paris ont été réalisées sous la direction du serrurier et métallurgiste Pierre Deumier, dont on sait peu de choses, si ce n'est qu'il était actif dans les années 1760, qu'il a été reçu maître serrurier et qu'il a été nommé serrurier du roi et de la ville. Il était chargé de fournir des ouvrages métalliques pour les bâtiments royaux et diverses cours européennes, ses meubles les plus connus étant une paire de consoles néoclassiques en bronze argenté et doré ornées d'un masque féminin central, datant de 1765-1770 environ, qui ont été fournies au château royal de Varsovie (aujourd'hui au musée Nissim de Camondo, à Paris), ainsi qu'un exemplaire similaire de la même époque, d'après un dessin de Victor Louis et Jean-Louis Prieur, qui se trouve aujourd'hui dans la collection du Getty Museum.
Le deuxième centre où l'on fabriquait d'élégants meubles en métal était le sud de la France, notamment en Provence et dans la région d'Avignon et de Marseille, où les grandes maisons de ville regorgeaient d'exemples reflétant les compétences techniques et l'imagination artistique des serruriers locaux au XVIIIe siècle. On le voit dans les escaliers, les balcons et surtout dans les nombreuses églises, depuis les tables de communion, les balustrades d'autel et les baldaquins, jusqu'aux simples motifs ornementaux.

En matière de fabrication de consoles, celles réalisées à Paris étaient généralement plus raffinées et sobres dans leur conception, tandis que celles fabriquées dans le sud de la France avaient tendance à être plus exubérantes dans leur style, reflétant les goûts de l'Italie voisine. Si nous savons, grâce à d'anciens inventaires, que de telles consoles ont été fabriquées pour plusieurs demeures privées à Aix, Marseille et Avignon, seules quelques rares consoles d'apparat en fer forgé, telles que celle présentée ici, ont survécu. Encore moins ont conservé leur emplacement d'origine, parmi lesquels un exemplaire au château d'Avignon en Camargue. Notre pièce a très certainement été fabriquée en Provence, et plus précisément dans le Comtat Venaissin, car la combinaison des lignes et du graphisme du design rappelle la décoration architecturale de cette région. Parmi les autres caractéristiques distinctives, on peut citer les motifs stylisés de coquillages et de têtes de masques, ainsi que les pieds prononcés en forme de S.