L’Enfant Jésus

... main droite levée, l’enfant montre le geste de la bénédiction ou de la parole – une indication de sa mission divine. Dans la main gauche, il tient l’orbis cruciger, le globe terrestre avec la croix (celle-ci a été perdue au cours des siècles), symbole de sa domination sur la terre et de sa victoire par la croix. L’enfant révèle ainsi déjà l’exigence que le salut du monde passe par le Christ sous forme humaine. L’enfant Jésus regarde ouvertement vers l’avant, un léger sourire étire ses lèvres. Les petites boucles dorées se détachent audacieusement de la tête – une caractéristique typique des personnages de Malines qui renforce encore leur vivacité.

Malines comme centre
Malines était au 16e siècle un important centre de sculpture religieuse dans les Pays-Bas habsbourgeois. C’est de là que les petites statues de Jésus, également connues sous le nom français de L’Enfant Jésus de Malines, se sont répandues en France et plus tard dans les collections catholiques du monde entier. Généralement sculptées dans une seule pièce de bois de noyer, elles servaient d’objets de dévotion dans la sphère privée comme dans les monastères. Cependant, la production visait particulièrement le marché privé : les figurines qui créaient une proximité familiale et soulignaient les traits enfantins étaient très demandées. L’enfant Jésus nu debout devint ainsi un type populaire, car il créait un lien entre l’intimité et la théologie. Sa taille pratique le rendait transportable et sa représentation touchante encourageait une piété personnelle envers le Christ.
Une pièce de comparaison importante se trouve aujourd’hui au Louvre à Paris (Inv. n° RF 2009.05). Là aussi, l’enfant est représenté dévêtu et debout en contre-plongée, avec un geste de bénédiction et un globe terrestre. La coiffure en calotte posée à plat et les boucles qui partent en volutes sur les côtés montrent en particulier l’étroite parenté stylistique.

Contexte iconographique
Cette représentation s’inscrit dans la longue tradition des représentations de l’enfance de Jésus, qui connurent un nouvel essor dans le sillage de la dévotion de la fin du Moyen Âge. L’enfant Jésus n’était plus seulement montré comme un nouveau-né impuissant, mais aussi comme le souverain du monde bénissant – à la fois divin et humain, sublime et pourtant proche. Cette apparence « réaliste » et enfantine facilitait l’accès à la dévotion : on pouvait vénérer Jésus non seulement en tant que Dieu, mais aussi en tant que petit enfant, de manière émotionnellement « tangible ».

Effet
Ainsi, cet Enfant Jésus de Malines incarne la profondeur théologique et émotionnelle de son époque – en tant que signe visible de la présence du Christ, mais aussi en tant qu’expression d’une piété personnelle et réconfortante. Il allie de manière impressionnante la grâce enfantine et la signification sacrée.

Littérature

Fanny Cayron – Delphine Steyaert, « Made in Malines. Les statuettes malinoises ou poupées de Malines de 1500-1540 », Étude matérielle et typologique, Brussel 2019.

Sophie Guillot de Suduiraut – Christine Lancestremère, « La production de statuettes à Malines », in : Michele Tomasi (éd.), L’art multiplié. Production de masse, en série, pour le marché dans les arts entre Moyen Âge et Renaissance, Rome 2011, 89-103.