Par Galerie Alexandre Piatti
Ce bassin en marbre italien date de la fin du XV? siècle illustre avec éclat la redécouverte de l’Antique propre à la Renaissance. De forme circulaire et profondément creusée, il est orné sur tout son pourtour d’un relief sculpté d’une grande richesse symbolique.
Quatre têtes de lion, réparties symétriquement sur les quatre faces, rythment l’ensemble. De leurs gueules puissantes s’échappent de longues guirlandes de fruits, de fleurs et de feuillages, maintenues par des rubans délicatement sculptés qui serpentent autour du bassin. Ces guirlandes, rendues avec une densité et une vigueur remarquables, mêlent grappes de raisin, grenades, fleurs écloses et feuilles variées, formant un feston continu qui souligne le mouvement circulaire de l’objet. À la base, un orifice central, percé sous le fond, laisse supposer que le bassin était à l’origine posé sur un piédouche ou un socle mouluré, dispositif courant pour ce type de d’oeuvre.
L’ensemble ...
... du décor s’inspire directement du répertoire antique, et plus précisément des sarcophages romains à guirlandes, dont les festons de feuilles, de fruits et de fleurs symbolisaient la fertilité, le cycle des saisons et l’espérance de renaissance. Ces modèles antiques, redécouverts et étudiés avec passion dès le milieu du XVe siècle en Italie ont profondément marqué les sculpteurs de la Renaissance. Ces derniers, fascinés par la beauté et la symbolique de ces motifs, les ont réinterprétés dans des oeuvres décoratives destinées à orner jardins, fontaines ou demeures aristocratiques. Ainsi ce bassin devient à cette époque à la fois un objet d’ornement et l’affirmation d’un idéal de mesure, d’harmonie et de beauté classique.
Les têtes de lion, qui encadrent les guirlandes, jouent un rôle à la fois plastique et symbolique. Dans la culture antique comme dans l’art chrétien, le lion est le gardien par excellence, symbole de force, de vigilance et de majesté. Ses traits puissants et son regard fixe traduisent une présence à la fois physique et morale : il veille sur l’espace qu’il orne, repoussant les forces maléfiques et protégeant le lieu. Dans les fontaines et bassins de la Renaissance, la figure du lion conserve cette valeur protectrice, mais s’enrichit d’une dimension morale et spirituelle. La gueule du lion d’ou jaillit les guirlandes symbolise la purification, chassant les impuretés et les influences néfastes.
Le décor végétal du bassin, quant à lui, se charge de sens allégoriques multiples. Les feuilles sculptées peuvent rappeler la gloire et la victoire, ou alors renvoyer à la puissance et à la présence. Les grappes de raisin, attributs de Cérès et de Bacchus, évoquent la fertilité, la prospérité et le cycle naturel de la vie. La pomme de pin, quant à elle, est un symbole d’immortalité et de renaissance. L’ensemble de ces éléments végétaux tisse un langage iconographique cohérent, où la nature, par sa fécondité et son éternel renouvellement, devient une métaphore de la continuité de la vie et de la résurrection de l’âme, à la manière du mythe de Cérès et de Proserpine.
L’influence de ce type de décor se retrouve dans plusieurs exemples, qui témoignent de la diffusion du motif des guirlandes soutenues par des têtes d’animaux dans la sculpture italienne de la Renaissance. À Florence, Mino da Fiesole (1429-1484) réalise entre 1471 et 1477 une frise ornée de festons et de lions (aujourd’hui conservée au musée du Louvre), où l’on retrouve la même rigueur de composition, la même alternance de pleins et de vides, et la même vitalité des décorations de fruits et de feuillages. À Sienne, Antonio Federighi (vers 1420-1490) développe, dans ses bassins et colonnes décoratives des années 1460-1470, un vocabulaire analogue, caractérisé par l’abondance des feuillages, des fruits et des fleurs, traduits dans un relief nerveux et luxuriant. Ces oeuvres, issues de contextes civils ou religieux, participent d’une même recherche : celle de la transposition du langage ornemental antique dans une sculpture vivante, expressive et chargée de sens.
Ainsi ce bassin témoigne de la capacité des artistes italiens du XV? siècle à fondre l’héritage antique dans une création profondément humaniste. La matière du marbre, polie et patinée, confère à l’oeuvre une présence tangible et noble, tandis que la rigueur symétrique du décor évoque l’ordre et la mesure recherchés par les sculpteurs de la Renaissance. Par la vitalité de ses guirlandes, la majesté de ses lions et l’équilibre de sa composition, ce vase se présente comme un manifeste de la sculpture all’antica : un objet à la fois ornemental, symbolique et spirituel, célébrant la puissance de la nature, la force du gardien et l’idéal de beauté hérité de l’Antiquité.
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