Par Galerie de Frise
Virginia VEZZI, attribuée à
(Velletri, 1600 – Paris, 1638)
Saint Sébastien tenant une flèche
Huile sur cuivre
H. 21,7 cm ; L. 16,8 cm
Vers 1625
Œuvre en rapport : tableau conservé au musée de Houston pour lequel notre peinture est un travail préparatoire ou une réplique
Précisons en premier lieu que la période italienne de Simon Vouet et de ses collaborateurs, à laquelle se rattache ce précieux petit panneau de cuivre, est depuis plusieurs décennies un terrain très complexe en matière d’attributions, avec des avis nombreux, divergents et changeants, reposant souvent sur des préceptes fragiles, en particulier pour les tableaux de demi-figures. Rappelons aussi que Simon Vouet (Paris, 1590 – Paris, 1649), probablement le peintre français le plus important du XVIIème siècle avec Poussin et Champaigne, travailla en Italie de 1612 à 1627, principalement à Rome, avant de retourner définitivement à Paris.
Notre œuvre présente la même composition ...
... que l’assez grande l’huile sur toile (95,9 x 73,7 cm) conservée depuis 1990 au musée de Houston (USA), qui la présente, encore à ce jour, comme de Vouet ; sa très grande qualité n’empêche cependant pas des spécialistes de la période romaine de Vouet, comme P. Malgouyres et D. Jacquot, de plutôt y reconnaître une autre main, en particulier celle de Charles Mellin (Nancy, 1597 – Rome, 1649), un des principaux artistes de l’entourage du maître, avec éventuellement la participation du cavalier Muti, un émule italien de Vouet et proche de Mellin. On connaît par ailleurs une autre version, quasi identique et de dimensions proches (94 x 77 cm), mais d’exécution plus faible, passée en vente publique en Allemagne en 2024 et décrite comme « Atelier de Mellin ».
Si l’auteur de composition semble poser interrogation, il existe pourtant un élément assez tangible militant en faveur de Vouet : les archives du procès du marchand de tableaux Fabrizio Valguarnera, se déroulant en 1631, mentionnent en effet la vente à l’abbé Corsetti d’un tableau sur toile bien décrit comme de la main de Vouet, représentant un saint Sébastien en demi-figure. Certes, il existe aussi un tableau entré entre 1626 et 1631 dans les inventaires du cardinal Barberini, décrit comme réalisé par le frère du cavalier Muti, représentant un saint Sébastien qui tient des flèches à la main, avec une bande de taffetas rouge ; ce dernier tableau pourrait correspondre à la version plus faible passée sur le marché allemand déjà citée. D’autant que l’évocation de saint Sébastien, avec une ou plusieurs flèches à la main, sans être rarissime, n’est pas fréquente, comparé aux nombreuses représentations du martyre du saint, avec ou sans la présence d’Irène le soignant et lui retirant ses flèches, sujet que Vouet traita lui-même dans un tableau vers 1621.
Image baroque inspirée par le ténébrisme caravagesque (peut-être aussi par Bernardo Strozzi, lui-même marqué par le Caravage, notamment dans la pose et l’inclinaison du visage, et par Guido Reni) le tableau de Houston dégage beaucoup de puissance et d’émotion, et possède une dimension dramatique, voire romantique, que nous ne retrouvons pas dans notre cuivre. Celui-ci possède un côté plus délicat, plus féminin, probablement accentué par le visage diaphane, presque androgyne, du saint, assez différent du bel éphèbe tourmenté de Houston.
C’est pourquoi nous partons volontiers sur la piste de Virginia Vezzi (ou da Vezzo), que Simon Vouet épousa en 1626, et seule femme artiste de son entourage proche. N’oublions pas par ailleurs que Vezzi était réputée pour son habileté à peindre en petits format, si l’on en croit Mariette : « [elle] dessinoit agréablement, peignoit en miniature et pouvoit travailler d’après ses propres compositions ». En revanche, les rapprochements stylistiques s’avèrent difficiles, car à ce jour un seul tableau est considéré avec certitude comme de Virginia (la très belle Judith et Holopherne acquise par le musée de Nantes en 2009), grâce à la gravure correspondante de Claude Mellan (un autre artiste talentueux du cercle de Vouet) qui porte la mention Virginia de Vezzo pinx . Et les œuvres qui lui sont attribuées plus ou moins solidement semblent avoir une cohérence stylistique peu évidente.
Concernant notre cuivre, la question se pose de savoir s’il s’agit d’un travail préalable au tableau de Houston, ou bien d’une réplique de ce tableau. Nous pouvons raisonnablement éliminer le fait qu’il s’agisse d’une copie servile d’atelier (bien qu’à Rome, Vouet n’ait pas véritablement d’atelier, mais plutôt un entourage, composé de quelques collaborateurs et élèves, comme son frère Aubin, Mellin, Vezzi, Mellan, Jacques de Letin, Vignon, Jean et Jacques Lhomme, JeanBaptiste Mola) ; au-delà de sa qualité, il s’en dégage effectivement une véritable personnalité, et l’originalité de sa main ne correspond pas aux productions plus ou moins habiles des imitateurs de Vouet. Ceci étant, il existe à l’époque un marché pour les répliques de petit format, notamment sur cuivre, dans lequel pourrait s’inscrire notre tableau. C’est ainsi l’opinion de G. Kazerouni, de P. Malgouyres (qui de son côté ne le voit pas réalisé dans l’atelier de Vouet), mais aussi d’A. Mérot, D. Jacquot et M. Weil-Curiel. Mais, pourquoi la composition n’aurait-elle pas fait l’objet d’une gravure, et pourquoi ne connaît-on, à ce jour, que seulement trois versions ? Dans ce cas, notre oeuvre pourrait répondre, non pas à une logique « commerciale » de diffusion, mais plutôt à la demande particulière d’un commanditaire (appréciant cette composition) aisé, expliquant l’utilisation du cuivre, un support alors particulièrement onéreux. Autre hypothèse, séduisante, envisagée par D. Jacquot et M. Weil-Curiel (qualifiée par eux de « purement intellectuelle et donc hautement fragile »), et partant du précepte que le tableau de Houston serait de Mellin : le cuivre aurait pu être peint par un des deux frères Muti (Prospero ou Gian-Battista dit le Cavalier, les fils du marquis Muti qui abrita et protégea Mellin à partir de 1627) d’après le prototype de leur maître et mentor Mellin, un peu comme un exercice dans leur apprentissage de la peinture en tant que gentilshommes amateurs ; leur aisance financière leur permettant d’utiliser un support comme le cuivre. Mais pourquoi « s’exercer » sur un si petit format ? On ne connaît d’ailleurs pas de tableaux (format, support, style) comparables donnés aux Muti.
Il faut aussi prendre en compte les trois éléments suivants :
- La qualité de la peinture, malgré les usures du temps et la probable disparition de glacis, est élevée, comme le constatent D. Jacquot et A. Mérot ; aussi peut-elle s’accorder avec des artistes « dilettantes » comme les frères Muti, ou des suiveurs inconnus ?
- Le cuivre présente deux repentirs (le choix lors de la restauration a été de les laisser visibles), au niveau de la ligne de l’épaule gauche du saint, et dans la main qui tient la flèche, avec la présence d’un sixième doigt. Les repentirs peuvent se produire chez l
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