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Au XVIIIe siècle, le portait devient un des genres majeurs de la peinture au détriment de la peinture d’histoire. Les portraits se font plus personnels mais représentent toujours la grandeur du personnage. Ceci se traduit dans le portrait militaire par la volonté de montrer la puissance du commanditaire mais également sa personnalité.

Epoque :

Le portrait militaire est un genre particulier apparu au XVIe siècle et qui se développe aux XVIIIe et XIXe siècles. Ce type de représentation mêle la peinture de portrait et celle d’histoire.

Le portrait est un genre présent dès l’Antiquité et un attribut de pouvoir pour les grands hommes. Le portraitiste crée le plus souvent une œuvre sur commande, représentant le notable dans toute sa gloire. Les peintures de portraits célèbrent d’abord les puissants mais, avec le temps, la bourgeoisie accède à cet art et se fait régulièrement portraiturer. Le portrait de Cour se développe réellement au XVIe siècle, sous l’influence des peintres italiens comme Giorgione ou Titien et en Angleterre grâce à Antoon Van Dyck. Au XVIIIe siècle de nombreux peintres se spécialisent dans la peinture de portrait, notamment pour représenter les nobles du Royaume. Nous pouvons notamment citer Hyacinthe Rigaud et Elisabeth Vigée-Lebrun, qui représentent tous deux le plus fidèlement les personnages de la Cour. C’est au XVIIIe siècle que le portrait connaît son âge d’or. L’intimité se fait alors ressentir au travers de portraits dépeignant la personnalité du commanditaire. Au-delà de la peinture Quentin de La Tour développe le portrait grâce à un nouveau médium, le pastel.

Le portrait militaire est également influencé par la peinture d’histoire et de guerre, dont il représente les principaux protagonistes. La peinture d’histoire s’inspire de scènes variées issues de l’histoire antique, chrétienne ou contemporaine. Au XVIIe siècle, elle est considérée comme le genre majeur dans la hiérarchie des genres en peinture mais perd de son hégémonie à la fin du XVIIIe siècle au profit du portrait et de représentations plus intimes. Le portrait militaire, inspiré des grandes batailles, permet au noble de se faire portraiturer seul en guerrier. La grande peinture d’histoire connaît son apogée sous le règne de Louis XIV avec les représentations de Charles Lebrun ou Van der Meulen. L’époque des galanteries et de la frivolité amenée par les règnes de Louis XV, puis de Louis XVI, relègue la peinture d’histoire au second rang. Jacques-Louis David s’essaye par la suite à ce thème dans le plus pur style néo-classique, sans réussir à lui rendre toutes ses lettres de noblesse.

La bataille de Clavijo XVIIIe siècle
Attribué à Pauwels Casteels, La bataille de Clavijo, XVIIIe siècle, huile sur cuivre, Art & Antiquités Investment

Caractéristiques :

Le portrait militaire, mettant en scène un souverain ou un personnage aristocratique, est très utilisé pour représenter la noblesse de sang d’abord lié au métier des armes et à la chevalerie. Du XVIe au XVIIIe siècle, la représentation du portrait militaire reste assez constante. Les personnages sont dépeints cuirassés, en habits militaires étincelants et richement ornés. Des attributs militaires sont parfois ajoutés à la composition comme un casque, une épée, un bâton de commandement ou des médailles militaires. Afin d’atténuer l’aspect sombre de ces représentations militaires, le personnage est vêtu de collerettes blanches et de riches étoffes. Le fond du tableau peut être d’une couleur foncée ou bien « en situation » devant un champ de bataille. Les adultes ne sont pas les seuls à se faire représenter en habits militaires. Les enfants de la famille royale peuvent également être peints en guerriers, bien que cela soit plus rare.

Portrait du maréchal Anne-Jules de Noailles - Hyacinthe Rigaud
Atelier de Hyacinthe Rigaud, Portrait du maréchal Anne-Jules de Noailles, Ecole française du XVIIe siècle, HST, Catel Antiquités
Portrait d’homme en cuirasse - Entourage de Calre Van Loo
Entourage de Carle Van Loo, Portrait d’homme en cuirasse, Ecole française du XVIIIe siècle, HST, Galerie Artmediacom

Les rois ont coutume de se faire représenter en tenue de sacre et en tenue militaire afin de représenter leur pouvoir royal. En tenue de sacre, le statut de chef militaire du Roi est symbolisé par l’épée que celui-ci porte fièrement. Ce modèle de portrait officiel est instauré par Louis XIV en 1701 dans son portrait en costume royal commandé pour son petit-fils le roi Philippe V d’Espagne. Il est représenté en majesté, entouré de tous les symboles du pouvoir royal et devant un drapé rouge au sein d’une salle de Versailles. La mise en scène de ce portrait montre l’autorité du Roi sur ses sujets, en tant que chef religieux (symbolisé par le manteau fleurdelisé et doublé d’hermine) et chef militaire (symbolisé par l’épée).

Louis XIV - Hyacinthe Rigaud
Hyacinthe Rigaud, Louis XIV en habit de sacre, 1701, HST, Musée du Louvre (libre de droit)

Jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, les monarques ont pour habitude de se faire portraiturer en armure devant un champ de bataille ou dans un intérieur. Louis XIV et Louis XV se font régulièrement représenter en armures, vêtus du manteau bleu fleurdelisé, afin de témoigner de leur pouvoir militaire. L’essor du pastel au XVIIIe siècle touche également le portrait militaire. Louis XV se fait alors portraiturer en armure par Maurice Quentin de La Tour en 1748 dans un magnifique pastel conservé au Musée du Louvre.

Louis XV - Maurice Quentin de La Tour
Maurice Quentin de La Tour, Portrait de Louis XV, 1748,
pastel sur papier gris-bleu, Musée du Louvre (libre de droit)

Il existe très peu de portraits militaires de Louis XVI, celui-ci ayant connu peu de faits de guerre durant son règne. La principale guerre qu’ait mené Louis XVI se situe bien loin de la France, aux Etats-Unis. En effet, la France sous Louis XVI s’engage contre l’Angleterre et envoie des troupes maritimes et terrestres en Amérique pour soutenir l’insurrection. C’est le principal conflit connu sous le règne de Louis XVI (en dehors de la Révolution française), qui souhaite davantage assurer la paix plutôt qu’être un Roi guerrier comme ses prédécesseurs. Afin de garder un royaume apaisé, Louis XVI maîtrise parfaitement son image et souhaite être perçu comme un roi modeste. Les peintures le représentant glorieux sont donc rares, tout comme celles où il apparaît en armure et en chef militaire. Un des seuls exemplaires connus est un portrait équestre de Louis XVI en armure, couronné par la Victoire. Cette huile sur toile exposée dans les Petits Appartements du Château de Versailles montre un roi triomphant. Cette peinture est en parfaite opposition avec la modestie feinte de Louis XVI, qui avait refusé d’être représenté avec une couronne de laurier sur une monnaie créée après la victoire de la guerre d’indépendance américaine.

Portrait équestre de Louis XVI
Inconnu, Portrait équestre de Louis XVI en armure couronné par la Victoire,
seconde moitié du XVIIIe siècle ©Château de Versailles

Artistes-clés et musées :

De nombreux artistes s’adonnent à la peinture de portrait militaire. Les œuvres destinées à la famille royale ou à la noblesse sont créées par les plus grands artistes de leurs temps. Ceux-ci peignent toutes sortes de tableaux représentant la famille royale comme des portraits officiels ou plus intimes, mais également des portraits militaires.

Hyacinthe Rigaud (1659-1743)

Hyacinthe Rigaud est un peintre français spécialisé dans le portrait.

Il débute ses études de peinture dans l’atelier d’Antoine Ranc à Montpellier en 1671 puis s’installe à Lyon quatre ans plus tard. En 1681 il se rend à Paris et remporte le Prix de Rome en 1682, bien qu’il ne fasse pas le voyage à Rome. Il est reçu à l’Académie Royale de Peinture et de Sculpture en 1700, dont il prend peu à peu la tête jusqu’en 1735. Hyacinthe Rigaud est connu pour ses nombreux portraits fidèles et de grandes qualités qui lui sont commandités par la dynastie des Bourbons entre 1680 et 1740. Rigaud produit également des portraits privés de nobles et bourgeois de toute l’Europe, mais aussi de proches, amis ou artistes. Cet artiste est particulièrement apprécié pour ses portraits traduisant à la perfection le rang et le prestige du personnage, mais également pour la ressemblance des visages. Enfin, les créations de ce peintre sont remarquables par le traitement parfait des étoffes chatoyantes sous la lumière. Ses peintures de portraits militaires sont exposées dans de nombreux musées et notamment le Musée du Louvre, le Musée National du Prado et le Musée Rigaud de Perpignan.

Portrait de Philippe II, duc de Chartres - Hyacinthe Rigaud
Hyacinthe Rigaud, Portrait de Philippe II, duc de Chartres, 1689, HST, Musée Rigaud (libre de droit)
Portrait de Louis XIV - Hyacinthe Rigaud
Hyacinthe Rigaud, Portrait de Louis XIV, 1701, HST © Musée National du Prado

Jean Ranc (1674-1735)

Jean Ranc est un peintre français spécialisé dans les portraits. Son père Antoine Ranc « le vieux » est un peintre dont la renommée s’étend à Montpellier et sa région. Il forme de jeunes peintres de la région dont Hyacinthe Rigaud dès 1671 et son propre fils Jean Ranc. Celui-ci s’installe à Paris en 1696 et entre à l’Académie Royale de Peinture et de Sculpture en 1703 en tant que portraitiste. Jean Ranc peint alors de très nombreux portraits pour la bourgeoisie parisienne dans le goût de Rigaud et Nattier. Il arrive en 1722 à Madrid à la demande du roi Philippe V afin de portraiturer les Bourbons d’Espagne. Jean Ranc a peu produit de portraits militaires et est plutôt connu pour ses portraits plus intimes. On lui connaît un portrait de Louis XIV en armure peint à quatre mains par Rigaud et Ranc en 1694 et conservé à Brünswick.

Portrait de Louis XIV - Rigaud et Ranc
Hyacinthe Rigaud et Jean Ranc, Portrait de Louis XIV, 1694, HST
© Herzog Anton Ulrich-Museum, Brünswick

Joseph-Siffrein Duplessis (1725-1802)

Joseph-Siffrein Duplessis est un peintre français et portraitiste. Il étudie la peinture auprès de son père et du peintre Joseph Imbert puis rejoint en 1744 l’atelier de Pierre Subleyras à Rome. Revenu en France, il décide de s’installer à Paris en 1752 et est reçu à l’Académie Royale de peinture et de sculpture en 1774. Ses portraits sont alors très appréciés des nobles et bourgeois parisiens pour leur ressemblance et leur expressivité. C’est en 1777 que Joseph-Siffrein Duplessis obtient la consécration grâce à un important portrait de Louis XVI en costume de sacre que l’on peut aujourd’hui admirer au Musée Carnavalet à Paris. Un an auparavant, Duplessis avait déjà représenté Louis XVI dans un admirable portrait militaire très ressemblant, où le monarque aborde avec fierté ses insignes militaires. Ce portrait est conservé au Château de Versailles.

Louis XVI - Joseph Siffrein-Duplessis
Joseph Siffrein-Duplessis, Louis XVI en habit de sacre, 1777, HST, Musée Carnavalet (libre de droit)
Louis XVI - Joseph Siffrein-Duplessis - Versailles
Joseph Siffrein-Duplessis, Louis XVI, 1776, HST, Château de Versailles (libre de droit)

Charles-André van Loo (dit Carle van Loo) (1705-1765)

Charles-André van Loo est un peintre français d’origine hollandaise appartenant à la dynastie d’artistes des van Loo. Dans un premier temps, il étudie la peinture à Rome auprès de Benedetto Luti puis rentre à Paris en 1719 où il s’essaie à la peinture religieuse. Il remporte le Prix de Rome en 1724 et part étudier à l’Académie de France à Rome durant cinq ans où il se fait connaître pour ses peintures de plafonds en trompe-l’œil. De retour à Paris en 1734, il devient membre de l’Académie Royale de Peinture et de Sculpture en 1735 et reconnu comme peintre d’histoire. La carrière de van Loo se développe très rapidement jusqu’à devenir Premier peintre du Roi en 1762. Il travaille notamment pour la famille royale mais également pour de riches notables et pour l’Eglise, pour laquelle il crée de nombreux tableaux. Carle van Loo est connu pour ses peintures d’histoire, en rupture avec le style rococo alors à la mode, mais également pour ses portraits. Il s’adapte alors au goût du commanditaire tout en conservant une peinture soignée, portant une attention particulière aux costumes. Ces portraits militaires ou civils, comme pour ce portrait de Louis XV en armure conservé au Musée des Beaux-arts de Dijon, ont tous des coloris sombres et présentent le commanditaire dans toute sa gloire et son autorité.

Louis XV en armure - Carle van Loo
Carle van Loo, Louis XV en armure, 1750, HST ©Musée des beaux-arts de Dijon

Louis-Michel van Loo (1707-1771)

Louis-Michel van Loo est un peintre français d’origine hollandaise appartenant à la dynastie des van Loo. Il étudie la peinture auprès de son père Jean-Baptiste van Loo en Italie avant de remporter le Prix de Rome en 1725. Il étudie à Rome de 1727 à 1732 avec son oncle Carle van Loo puis s’installe en Espagne où il devient le portraitiste officiel de Philippe V à la suite de Jean Ranc. Dans la lignée de Hyacinthe Rigaud, ses portraits d’apparats dépeignent la grandeur du personnage. Cependant, il s’intéresse également à l’étude psychologique et traduit à merveille la personnalité du commanditaire. Louis-Michel van Loo peint peu de portraits militaires mais il est connu pour son portrait officiel de Louis XVI en costume de sacre conservé au Château de Versailles. Le Roi est ici représenté entouré des attributs du pouvoir portant notamment l’épée, symbole de son pouvoir militaire. Dans la tradition des portraits de sacre de Hyacinthe Rigaud, Louis-Michel van Loo présente Louis XVI en majesté mais son visage traduit parfaitement sa personnalité.

Louis XV sacre - Louis Michel Van Loo
Louis-Michel Van Loo, Louis XV en habit de sacre, vers 1760, HST, Château de Versailles

Maurice Quentin Delatour (dit Maurice Quentin de La Tour) (1704-1788)

Maurice Quentin Delatou est un pastelliste français spécialisé dans les portraits. Il entreprend des études de peinture chez Claude Dupouch à l’Académie de Saint-Luc de 1719 à 1722. C’est en 1723 que son apprentissage débute réellement chez le peintre Jean-Jacques Spoëde. Maurice Quentin de La Tour se forme pourtant seul au pastel, technique de nouveau très appréciée au XVIIIe siècle. Son talent est reconnu de tous en 1735, après la réalisation d’un magnifique portrait de Voltaire au pastel. Sa renommée est telle que l’artiste réalise de nombreux portraits pour la famille royale, l’aristocratie et la grande bourgeoisie. Il est reçu à l’Académie Royale de Peinture et de Sculpture en 1746 et devient Peintre du Roi en 1750. Face au succès de ses œuvres, il est surnommé « le prince des pastellistes » et souhaite faire du pastel la technique dominante du portrait. Cette volonté échoue notamment du fait de la grande fragilité du pastel que l’artiste ne parvient pas à fixer et à rendre aussi durable que la peinture à l’huile. Les portraits de Maurice Quentin de La Tour sont très appréciés pour leur modelé souple, leur ressemblance et la retranscription parfaite de la personnalité du commanditaire au travers d’un regard, un sourire ou une expression. La lumière est très travaillée, tout comme la posture et les couleurs utilisées qui mettent d’autant plus en valeur le personnage. Maurice Quentin de La Tour a produit de nombreux portraits militaires et notamment un portait de Louis XV en armure, conservé au Musée du Louvre. Sur cette œuvre, nous pouvons constater la parfaite maîtrise du portrait au pastel par Quentin de La Tour. Représenté en vainqueur de la guerre de Succession d’Autriche, Louis XV a une allure souveraine. La personnalité du souverain, son autorité et sa fierté sons dépeints par un regard franc et un léger sourire esquissé. L’armure que porte le Roi marque le symbole de son pouvoir et de sa victoire militaire. D’autres attributs représentent son pouvoir royal comme le collier de l’ordre du Saint-Esprit et le manteau fleurdelisé. L’éclairage soigné met en lumière les reflets sur la cuirasse et le visage du souverain.

Portrait militaire au 18eme siècle

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