Tapisserie Verdure Manufacture Royale Aubusson 18e siècle d'apres Jean-Baptiste OUDRY

... murs.

L’œuvre déploie une scène pastorale et animalière où la nature, idéalisée et luxuriante, occupe la place centrale. Le regard est immédiatement attiré par la densité de la végétation : de grands arbres aux troncs puissants et aux feuillages généreux s’élèvent sur toute la hauteur de la pièce, leurs frondaisons déclinant une riche palette de verts, rehaussés de nuances bleutées et dorées qui traduisent l’extraordinaire maîtrise des teinturiers d’Aubusson. Le paysage s’ouvre sur un lointain délicatement esquissé, où apparaissent des collines et quelques architectures villageoises, créant une profondeur atmosphérique d’une grande subtilité.

Au premier plan, la scène prend vie grâce à la présence d’animaux rendus avec une précision naturaliste caractéristique d’Oudry, grand peintre animalier et directeur de la Manufacture des Gobelins. On distingue un élégant héron se tenant près d’un cours d’eau, des oiseaux virevoltant dans l’air, ainsi qu’un groupe animé composé d’un chien bondissant, d’un coq majestueux et d’une renarde qui semble avoir capturé une proie. La tapisserie devient alors une véritable fable tissée, où se mêlent observation naturaliste et allusions morales, dans l’esprit des récits de La Fontaine qu’Oudry illustra également.

La bordure, richement travaillée, encadre la scène centrale d’un décor floral raffiné : bouquets de roses et guirlandes végétales se déploient sur un fond doré, renforçant l’impression d’abondance et de préciosité. Cette bordure sert à la fois de transition et de mise en valeur, accentuant l’effet de tableau mural propre aux grandes tapisseries de la période.

Cette pièce exceptionnelle témoigne de l’excellence technique et artistique des ateliers royaux d’Aubusson, dont la renommée s’étendait à toute l’Europe. Le tissage fin, la subtilité des dégradés chromatiques et l’équilibre de la composition traduisent un savoir-faire transmis depuis des générations et porté à son apogée au XVIIIe siècle. D’inspiration à la fois décorative et didactique, cette tapisserie incarne le goût des Lumières pour la nature, la pastorale et les fables morales.

Par ses dimensions, sa richesse ornementale et la qualité de son exécution, cette tapisserie de verdure d’après Jean-Baptiste Oudry constitue une pièce de collection rare, alliant la beauté décorative à la profondeur symbolique. Elle invite le spectateur à pénétrer dans un monde où la nature, sublimée par l’art du tissage, devient à la fois décor, théâtre et miroir des passions humaines.