Par Matthew Holder
Rare ensemble de douze assiettes peintes élisabéthaines (« Roundels »)
Angleterre, fin du XVI? siècle
Mesures
Chaque assiette : env. 13,5 cm de diamètre.
Boîte : 15,8 cm de diamètre ; 5,8 cm de haut.
Description
Ensemble de douze assiettes peintes de l’époque élisabéthaine, dites « roundels », finement tournées dans du sycomore et conservées dans leur boîte circulaire d’origine. Chaque assiette est ornée de bordures florales et fruitières peintes et dorées entourant un vers moral ou « poesie » inscrit en caractères gothiques. Les surfaces conservent des traces de leur laque protectrice d’origine. La boîte en sycomore tournée d’origine est également préservée, le revers de son couvercle portant l’étiquette de collection d’Owen Evan-Thomas (no 534).
Les vers sont à la fois moralisateurs et humoristiques, reflétant les préoccupations contemporaines liées au mariage, à la fidélité, à la prospérité et à la fortune. Leur ton ...
... enjoué les inscrit pleinement dans la culture élisabéthaine de l’esprit et de la convivialité, où les objets de table remplissaient à la fois des fonctions décoratives et sociales.
Fonction et contexte culturel
Les roundels, ou assiettes à fruits, apparaissent aux XVI? et XVII? siècles et étaient généralement produits par séries de huit, douze ou vingt-quatre. Durant le banquet, elles étaient disposées face cachée sur la table et utilisées côté uni. À la fin du repas, lors du service des « banquetting stuffe » — dragées, pastillages, douceurs et vin épicé (hippocras) —, on les retournait pour révéler les inscriptions. Les convives lisaient ou chantaient alors les vers à haute voix, souvent accompagnés au luth, transformant ces objets en supports de divertissement et d’échange social.
Cette pratique est décrite par George Puttenham dans The Arte of English Poesie (1589) : « Nous les appelons Poesies et nous les peignons aujourd’hui sur le revers de nos assiettes à fruits de bois. » Des inventaires de la fin du XVI? et du début du XVII? siècle mentionnent fréquemment de tels ensembles, attestant de leur popularité dans les milieux domestiques de l’élite.
Les “Poesies”
Les vers suivants sont inscrits sur les assiettes, tels qu’ils sont catalogués dans Domestic Utensils of Wood d’Owen Evan-Thomas :
1. Iff thou bee younge, then marie not yette / Iff thou bee old thou heyste more gette / For younge mens wives will not bee taught / And old mens wives be good for naught.
2. And hee that readers this verse even now / May hap to have a lowering fow / Whose lookes are nothing liked soo badd / As is her tounge to make hym madd.
3. This woman maie have husbands fyve / But never whilft she is a lyve / Yet doth shee hope soo well fore to wedd / Give upp they hope ytt fhall not nedd.
4. Take upp they fortune withe good hap / With riches thou doft fyll thy lap / Yett leefe were better for thy ftore / Why quietnesfe should bee the more.
5. Thou are the hapieft man a lyve / For every thing doth make the thrive / Yet maie thy wife thy maister bee / Therefore take thrift and all for mee.
6. Receave thy hap as fortune fendeth / But God ytt ys that fortune lendeth / Wherefore yh yu a haste gott / Thine wfly they selfe ytt ys thy lott.
7. Beshrewe his heart that married mee / My wife and I can never agree / A knavish queane by this I fweare / The god mans breechs fhee thinke to weare.
8. Iff that a bachelor thou bee / Keepe the fo still bee ruled by mee / Leafte that repentaunce all to late / Reward the with a broken pate.
9. Afke thou thy wife yf fhe can tell / Together thou in marriage hafte spedd well / And lett her fpeake as fhee doth knowe / For depound fhee will faie noo.
10. Thou hafte a fhrowe to thy good man / Perhaps an withrist to what than / Keepe hym as longe as hee can lyve / And att his end his pafeport give.
11. A wife that marrieth hufbandes three / Was never wifhed thereto by mee / Would my wife syould rather die / Than for my death to weep and crye. (Voir le rapport d’état pour plus d’informations.)
12. Thou mayst be poore and what for that / Now yt yu hadft neither cap nor hat / Thy mynd may yet foo quet bee / That yu may swym as muche as three.
Provenance
• Owen Evan-Thomas, avant 1932 (étiquette de collection no 534).
• A.H. Isher & Son, Cheltenham, avant 1945. Vendu pour £100 selon facture datée du 10 novembre 1945, décrivant : « Très rare ensemble de roundels élisabéthains illustré et décrit dans l’ouvrage d’Owen Evan Thomas Domestic Utensils of Treen, page 64, planche 24. »
• Dr Jim R.K. Thomson, O.B.E., M.R.C.S., L.R.C.P. (1890–1960), acquis auprès d’Isher en 1945.
• Puis transmis par descendance aux propriétaires précédents.
Accompagné de copies de la facture et de la correspondance originales d’A.H. Isher & Son, vers 1945.
État de conservation
Les assiettes sont en bon état général, avec une usure conforme à leur ancienneté. Aucune fente ; deux présentent de petites pertes sur les bords. La peinture est globalement bien conservée sur l’ensemble, avec quelques usures et manques mineurs ; la plupart conservent une grande partie de leur dorure et de leur polychromie d’origine, protégées par les surfaces laquées primitives. Le couvercle de la boîte a été restauré : le médaillon central, détaché à un moment donné, a été réparé avec grand soin et de manière très respectueuse.
Il convient de noter que la onzième assiette est un remplacement. L’originale, illustrée dans l’ouvrage d’Owen Evan-Thomas Domestic Utensils of Wood (1932), a manifestement disparu depuis la publication de ce livre. L’exemplaire actuel est toutefois une pièce d’époque, exactement du même atelier et de la même période, parfaitement assortie au reste du jeu sur les plans technique et stylistique. Sa poesie n’a pas encore été complètement déchiffrée, et le vers reproduit ci-dessus correspond à la version enregistrée par Owen Evan-Thomas. La liste complète des poesies provenant de son ouvrage a été conservée pour des raisons de cohérence.
Bibliographie
• Owen Evan-Thomas, Domestic Utensils of Wood, XVI?? to XIX?? Century (Londres, 1932), pp. 64–65, pls. 24–25 (cet ensemble illustré).
• E.H. Pinto, Treen and Other Wooden Bygones (Londres, 1979), pp. 79–80, pl. 77.
• George Puttenham, The Arte of English Poesie (1589).
Importance
Cet ensemble se distingue non seulement par sa complétude et son remarquable état de conservation, mais aussi par la présence de sa boîte d’origine en sycomore, par sa provenance prestigieuse et par son illustration dans l’ouvrage de référence fondamental d’Owen Evan-Thomas. Associé à la documentation d’A.H. Isher & Son et à la descendance du Dr Thomson, il constitue un témoignage majeur de la culture domestique et littéraire de l’époque élisabéthaine.
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