Par Matthew Holder
Pendentif en argent en forme de cœur orné d'une pierre crapaud.
Allemagne, fin du XVe/début du XVIe siècle.
Dimensions : 3,8 × 3 × 1,5 cm (hors bélière).
Ce rare pendentif en argent, en forme de cœur et probablement destiné à servir d'amulette protectrice pour un être cher, est serti d'une grande pierre crapaud aux teintes gris et bruns mouchetés. Sur un fond gravé, la pierre crapaud est surmontée de deux fleurs stylisées, une troisième étant placée en dessous, le tout enserré dans une délicate bordure torsadée. Le revers est finement gravé du christogramme IHS, entouré de feuillage fleuri – une fusion de symbolisme dévotionnel et d'intention apotropaïque.
Les talismans de ce type incarnaient une double protection : l'efficacité magique supposée de la pierre crapaud, associée à l'invocation divine du Christ.
On prêtait aux pierres à crapauds de puissantes propriétés médicinales et protectrices. Selon la légende, ces pierres ...
... mystérieuses se trouvaient dans la tête de crapauds vivants et transpiraient, changeaient de couleur ou chauffaient en présence de poison. Portées contre la peau ou appliquées directement sur les morsures et les blessures, elles étaient censées extraire le venin et éloigner le mal. Leur usage était reconnu dans des textes médiévaux, notamment le Livre des Secrets (XIIIe siècle), qui recommande d'avaler la pierre pour purger la corruption interne, après quoi elle pouvait être récupérée et réutilisée.
On retrouve un écho littéraire de cette croyance dans la pièce Comme il vous plaira de Shakespeare (vers 1599) :
« Doux sont les usages de l'adversité,
Qui, comme le crapaud, laid et venimeux,
Porte pourtant un précieux joyau sur sa tête. »
Malgré leurs origines mythiques, les pierres crapaudines sont en réalité les dents fossilisées de Lépidotes, un genre de poissons à nageoires rayonnées qui peuplaient les eaux préhistoriques au Jurassique et au Crétacé, il y a environ 200 à 100 millions d'années. Leur forme arrondie, semblable à un bouton, en faisait un objet idéal pour la joaillerie et les montures dévotionnelles, du Moyen Âge au XVIIIe siècle.
Le christogramme IHS, dérivé des trois premières lettres du nom grec de Jésus (??????), a été réinterprété en latin sous la forme Iesus Hominum Salvator (« Jésus, Sauveur des hommes »). Il a été largement utilisé dans l'iconographie chrétienne et adopté en grande partie par l'Ordre des Jésuites.
Ce pendentif, riche mélange de sciences naturelles, de mythes et de foi, offre un aperçu poignant des pratiques dévotionnelles et protectrices de l'Europe de la fin du Moyen Âge.
Exemples comparables :
Pour des pendentifs similaires incorporant des pierres de crapaud, voir :
British Museum, amulette en pierre de crapaud, numéro de musée OA.1379
Victoria and Albert Museum, amulette en pierre de crapaud, numéro de musée 8012-1862
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