Par Antiquités Philippe Glédel
Mobilier 18e, Meubles régionaux, Meubles de port
Rare et luxueuse petite commode dite "d'entre-deux" galbée toutes faces.
Ce modèle fort bien architecturé et parfaitement équilibré est recouvert d'un placage de bois de violette débité en travers disposé en frisages en diamant et en ailes de papillons avec encadrements de larges filets. Sa façade offre un opulent galbe en arbalète et présente trois tiroirs sur trois rangs séparés par des traverses intermédiaires foncées de cannelures de laiton. Elle est coiffée d'un marbre rouge des Flandres au pourtour mouluré d'un bec-de-corbin épousant les formes de la commode.
Les montants antérieurs à coins pincés sollicitent un léger galbe en élévation des flancs qui sont ici également galbés en plan. Ils sont reliés par une traverse basse soutenue par deux becquets dont les lignes droites viennent s'infléchir et se chantourner pour former le large tablier central.
L’ensemble est enrichi d’une précieuse garniture de bronzes dorés d'origine où se déploie ...
... avec souplesse un riche répertoire naturaliste composé principalement de motifs en ailes de chauve-souris et de mouvements "en C" godronnés. A souligner la qualité des bronzes, très ajourés, bien repoussés puis adoucis par une très délicate ciselure.
La qualité du bâti est à la mesure de celle du décor, fait de belles planches de sapin avec fonçures des tiroirs en hêtre et leurs fonds en noyer, profonds planchers intermédiaires sur lesquels coulissent les tiroirs montés à encastrement.
Le mouvement en arbalète, né à la Régence (qui se rencontre à Paris essentiellement sur les commodes de maîtres), l'ordonnance encore symétrique éveillée par une légère asymétrie, la présence de cannelures de laiton, la signature d'un ébéniste né en 1675 (et dont nous avons la certitude qu'il avait le statut de Maître ébéniste en 1714)*, l'absence de poinçon de Jurande, les essences du bâti (sapin et noyer) confirment une datation contemporaine de la Régence.
Ce modèle est donc "pleine époque", très élégant et propre à meubler les petits salons il perdurera sous Louis XV (et ainsi nous voyons ci-après en documentation l'ébéniste Mondon reprendre, quelques décennies plus tard, les modèles de Mallerot ou de Lieutaud).
Le meuble se présente dans un superbe état d'origine (aucun accident notable à signaler), avec tous ses bronzes d'époque, son marbre d'origine et non accidenté d'une épaisseur de 26 mm ainsi que ses trois anciennes et semblables serrures (une clé en bronze ciselé et doré), un état d'origine sublimé par une très délicate restauration et un vernis au tampon effectués par notre ébéniste.
Estampillée (deux fois) du monogramme M M pour Michel Mallerot.
Travail parisien de la fin de l'époque Régence.
Vers 1720 - 1725.
Michel Mallerot (1675 - 1753), est un ébéniste parisien encore peu connu, comme nous le sont encore les ébénistes du début du XVIIIe siècle. Il est sans doute mentionné pour la première fois dans l'édition de 1927 de l'ouvrage du Comte de Salverte : Les Ébénistes du XVIIIe siècle. Leurs œuvres et leurs marques (corpus corrigé et complété) ** et Pierre Verlet le cite dans la nomenclature des ébénistes de la seconde édition de son ouvrage : Les meubles français du XVIIIe siècle parue en 1982.
Rappelons qu'en effet ce n'est qu'à partir de 1743, suite à la promulgation des corporations, puis de l'édit de 1751 que les ébénistes se voient dans l'obligation d'estampiller leurs meubles. De plus, les plus grands ébénistes travaillaient souvent pour les marchands merciers ou la couronne et dans ces deux circonstances n'étaient pas tenus d'estampiller.
Ainsi il fut, avec Sageot, Gaudreaux, Doirat, Lieutaud, Garnier et quelques autres, l'un des premiers à estampiller, et de ses simples initiales au tracé large comme l'étaient souvent les premières estampilles. Une commode de nos anciennes collections, portant de même son estampille mais avec l'ajout de sa signature tracée "à la rubrique" sous le marbre, est venue corroborer l'attribution de ces initiales MM à Michel Mallerot.
** En référence à ce texte, et sans doute par lecture trop hâtive conduisant à une mauvaise interprétation, nous avons pu lire que Michel Mallerot aurait été reçu maître ébéniste en 1740. A l'âge de 65 ans il aurait battu le record du plus vieux postulant à ce titre. En vérité, nous ne connaissons pas la date de son accession à la maîtrise, Verlet (ci dessous) ne l'indique pas davantage et Salverte reprend ici un texte ancien qui pourrait être une entête de lettre par exemple et ainsi donc Michel Mallerot n'était ni davantage bourgeois ni davantage ébéniste après 1740 qu'avant. Etant français, ce qui n'était pas sans avantages, et vu sa date de naissance, nous pouvons bien plutôt présumer d'une accession à la maîtrise dans les toutes premières années du XVIIIe siècle.
Des recherches complémentaires nous ont permis d'en apprendre un peu plus sur cet ébéniste : Une précision tout d'abord sur son adresse, située « rue de la Roquette à gauche entre l'emplacement de l'Arquebuse et la Voierie ». Il épousa une certaine Mellot Marie et eut une descendance (on trouve la trace d'un fils menuisier ou ébéniste). Mais le plus intéressant est un acte daté de 1714 cité comme « concerné par un alloué entre ledit et Cibot Nicolas, pour un contrat de deux ans et demi, acté le 16/5/1714 ». Archives nationales. Minutier central des notaires de Paris. Fichier des artisans du XVIIIe siècle. Nous apprenons par là que l'ébéniste employa un compagnon à cette date.
* Ainsi nous pouvons affirmer avec certitude que Mallerot était déjà (et sinon avant cette date) Maître ébéniste en 1714.
Si nous n'avons pas (et peut-être pas encore) connaissance de modèles de commande pour la très haute aristocratie parisienne ou la couronne fabriquées par cet ébéniste, il travaillait visiblement cependant pour une riche clientèle parisienne, et les commodes que nous lui connaissons, contemporaines et proches de certains modèles de François Garnier ou d'Étienne Doirat, par leur qualité de fini, la beauté de leurs placages et les ciselures de leurs bronzes, n'ont rien à envier aux fabrications de ces deux grands maîtres.
Dimensions : 0,83 m de haut x 0,89 m de large (0,84 m à l'avant) x 0,53 m de profondeur.
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