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Du 16 septembre 2016 au 16 novembre 2016

La Galerie Émmanuel Redon expose un ensemble d'objets caractéristiques des styles qui ont animé le XIXe siècle français. Chacun d'eux offre un exemple du talent et de la créativité de ce siècle souvent méprisé par l'Histoire de l'Art.

Le XIXe siècle est une période de profonds changements et d'instabilité politique. Même si la Révolution Française se termine en 1799, l'onde de choc se prolonge jusque dans le dernier quart du XIXe siècle avec des répercussions sur tous les domaines dont les arts et industries. L'histoire de l'art est en effet toujours étroitement liée à celle de la politique d'un pays, ses guerres, ses conquêtes, ses échanges commerciaux car c'est par ce biais que l'art se ressource et que les artistes nourrissent leurs talents et leurs idées.

Pour cet ensemble d'objets, l'histoire commence à la Monarchie de Juillet (1830-1848) lorsqu'a lieu un véritable réveil de la création artistique. Le siècle réussit enfin à rejeter les principes du Néoclassicisme, abusé et épuisé par l'Empire sous la tyrannie de David et de ses deux disciples Percier et Fontaine, fournisseurs de tous les modèles, puis docilement repris par la Restauration (1814-1830).

Les prémisses du changement se font donc sentir à partir de 1830 facilités par l'émergence d'une nouvelle clientèle, la bourgeoisie, et par les progrès industriels qui vont d'ailleurs permettent de la satisfaire. Deux courants s'éveillent initialement, d'une part le naturalisme anglais importé par ODIOT après son apprentissage à Londres chez Garrard et le Romantisme, nouveau goût dicté par la littérature et la peinture.

Le goût anglais, sorte d'amalgame stylistique plutôt naturaliste, rompt certainement avec la froideur du classicisme tout en étant critiqué, "considéré comme révélateur de l'inexpérience en matière d'art de nos voisins"(1). Il s'inscrit parfaitement de par ses excès décoratifs dans le désir d'insouciance romantique tout en étant particulièrement adapté aux nouveaux modes de fabrication qui mettent l'orfèvrerie à la portée de tous.

(1) p. 464, Henry Hayward, Histoire de l'orfèvrerie française, Paris, 1896

Pourtant rapidement, face à cette invasion stylistique, les artistes vont réagir, dont notamment Fauconnier sur les conseils de Claude-Aimé CHENAVARD, récemment nommé à la Manufacture de Sèvres, qui tente les premiers essais de style Renaissance avec le concours d'artistes dont Klagmann, Feuchères ou Geoffroy de Chaumes.

Le Romantisme puise ses sources dans l'histoire de la Vieille France, surtout le Moyen-âge et la Renaissance pas toujours d'ailleurs bien compris. Ainsi Chenavard qui est un peu l'initiateur de l'art appliqué à l'industrie, prend ses ornements dans tous les styles, amalgamant et mélangeant les époques. Il exploite ainsi le style gothique qu'il traite de façon romantique pour donner ce que l'on va appeler le style 'Troubadour' qui tient la place d'honneur avec la Renaissance à l'Exposition de 1834.

Plusieurs orfèvres suivent rapidement cette nouvelle génération d'ornemanistes notamment Durand et LEBRUN déjà assistés d'artisans talentueux tels que les frères Fannière, puis suivi de Froment-Meurice.

 François-Désiré FROMENT-MEURICE est indubitablement le fabricant dans les styles anciens le plus connu et l'orfèvre romantique par définition. Il va avoir une énorme influence sur l'industrie qu'il ranime par son goût et sa créativité, "il a la science, l'audace inventive, l'imagination, la volonté directrice, l'absolue maitrise qui firent de lui un chef d'école (2).

Conjointement à ces styles anciens commencent à se répandre les styles exotiques surtout le genre ottoman. Des dessins dans ce goût figurent dans l'ouvrage de Jules Peyre publié avant 1842, et on trouve parmi les amateurs de ce genre Rudolphi mais aussi Jean-Valentin Morel et ensuite DUPONCHEL.

Si la Monarchie de Juillet fut une période de démocratisation, d'expansion économique et de développement industriel, elle reste stylistiquement la période la plus floue n'ayant montré vraiment que plus de langueur.

La crise économique qui s'abat en 1847 sur le pays soulève le mécontentement général et s'accompagne de révoltes populaires, pour éventuellement donner naissance à un nouvel état d'esprit plus réaliste et naturaliste. Stylistiquement cela se traduit par un retour tout spécialement aux styles du XVIIIe siècle alors que la Renaissance se démode avec le Romantisme.

(2) p.XXIII, Gustave Roger Sandoz et Jean Guiffrey, Arts appliqués et industries d'art aux expositions, Paris, 1912

La première exposition internationale qui a lieu à Londres en 1851 montre que la France doit plus que jamais défendre un style national et faire renaître une certaine unité de goût qui requiert le besoin d'éduquer les artistes mais aussi le public car ce qu'une 'génération invente devient le patrimoine de la génération qui lui succède (3).

Malgré l'instabilité politique des dernières années, le Second Empire (1852-1870) est marqué par la gaieté, la recherche de divertissements et de légèreté qui se fait parfois luxe tapageur, et voit donc le retour du XVIIIe, surtout le style Louis XVI qui a les faveurs de l'impératrice Eugénie et que la maison ODIOT exploite avec succès.

On voit aussi un certain engouement pour les 'japonaiseries' à la fin des années 1860 et dans les années 1870 cumulé avec un renouveau d'intérêt pour les autres styles orientaux.

La fin du Second Empire avec la guerre franco-prussienne de 1870 n'occasionne aucun grand changement stylistique. La vogue japonaise s'estompe, alors que le style rocaille et tout spécialement les modèles de Meissonnier reviennent à la mode dans les années 1880.

Ce retour du rocaille annonce en fait l'émergence du style Art Nouveau où la nature, la flore et la faune deviennent les thèmes de cette nouvelle ornementation.

(3) p.LVIII Sandoz, 1912

L'Exposition de 1889 en introduisant ce nouveau style confirme que l'art décoratif a bel et bien repris son évolution. On y sent clairement une certaine libéralisation des arts. Les orfèvres et les ornemanistes ont compris que les styles anciens du Moyen-âge et du XVIIIe tirent leur charme non pas de l'imitation rigoureuse de la nature mais de sa libre interprétation. Cette Exposition prouve aussi que la France a pris les mesures nécessaires pour éduquer ses artistes et ses artisans. La nationalisation du système éducatif, avec entre autres l'annexion des Beaux Arts au Ministère de l'Instruction publique, signifie en pratique que l'on peut enfin créer une culture du beau national. Le développement d'écoles techniques spécialisées, l'organisation de concours et d'expositions permettent de garantir la connaissance des styles et des techniques ainsi qu'une certaine unité stylistique.

Ce que le XIXe siècle a enseigné c'est que c'est cet esprit de collaboration entres les divers arts industriels, entre artistes et artisans mais aussi entre l'état et le public qui a permis de forcer une réflexion sur la notion d'un goût national permettant alors de renouveler les styles et de stimuler la création et l'Industrie. On ne peut donc que saluer la créativité des modèles mais aussi l'habilité de l'exécution, la finesse et la perfection de la main d'œuvre qui peuvent imiter les œuvres du grand siècle et produire des 'créations audacieuses et inventives capables de supporter la comparaison avec leurs ainées des siècles antérieures (4).

(4) p.468 cité au-dessus

 

INFORMATIONS PRATIQUES :

Emmanuel Redon Silver Fine Art 
Marché Biron – Galerie N°6 – 127 – 128
85, rue des Rosiers
93400 SAINT OUEN

 

Émmanuel Redon est expert CNe et membre du SNA

 

Auteur : Emmanuel Redon Silver Fine Art

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