Par Franck Baptiste Provence
Rarissime portrait de Marie Elisabeth d’Orléans (1695-1719).
Représentée en pied, la princesse est vêtue d’une robe de velours noir, elle tient dans une main un éventail et de son autre bras elle enlace tendrement son jeune page noir.
L’adolescent, vêtu d’un riche habit de laquais en velours rouge brodé de fil d’argent et coiffé d’un turban, arbore le collier d’argent caractéristique des esclaves.
La riche sol à damiers en marbre et la base d’une colonne en arrière plan, nous indiquent clairement que la scène se déroule dans un palais.
Huile sur toile, trés bel état de conservation, châssis d’origine.
Trés beau cadre d’époque en bois de chêne doré à la feuille.
Atelier de Pierre Gobert vers 1715-1719.
Cadre : Hauteur: 97 cm ; largeur : 81 cm
Toile : Hauteur : 82 cm ; Largeur : 66 cm
Marie Elisabeth d’Orléans née à Versailles le 20 Aout 1695 et morte en son château de la Muette le 20 Juillet 1719, est la fille du ...
... Régent Philippe d’Orléans et Françoise Marie de Bourbon, fille légitimée de Louis XIV est de Mme De Montespan.
Fille préférée de son père qui lui passe tout ses caprices, elle obtient un mariage avec le dernier fils du grand dauphin, Charles de France (1686-1714).
Ce mariage lui apporte richesse et titre et lui permet de devenir Duchesse de Berry en 1710.
A la suite du décès de son mari en 1714, elle emménage au palais du Luxembourg ou elle mène une vie de cours, enchainant les fêtes et les amants.
Elle recevra même le tsar de Russie en mai 1717.
Saint Simon qualifiera sa conduite de scandaleuse, adjectif qui deviendra pour elle presque un surnom.
Malgré ceci, la princesse continuera sa vie de cette manière en son château de la Muette, château que son père, devenu plus haut personnage de l’époque lui offre en 1717.
Des écrits virulents dénonçant une relation incestueuse entre le Régent et sa famille vaudront à Voltaire 11 mois de Bastille.
Il se servira de ce temps pour écrire sa pièce « Oedipe » qui sera jouée pour la première fois en 1718.
La princesse, fière et dédaigneuse, assistera aux cinq premières représentations.
Elle s’éteint en son château de la Muette en 1719, des suites d’une énième couche difficile, seulement âgée de 23 ans.
Figure emblématique de la Régence, elle restera dans les mémoires pour sa débauche et son train de vie faramineux.
Pierre Gobert (Fontainebleau 1662- Paris 1744)
Fils du sculpteur Jean Gobert , était un des portraitistes les plus demandés de la cour de Louis XIV. ?Portraitiste officiel du Roi et de la Reine, il entra à l'Académie Royale de peinture et sculpture en 1701 et connut une brillante carrière. ?Ses portraits féminins en particulier étaient très appréciés, en particulier grâce à sa capacité à rendre fidèlement les traits tout en soulignant la beauté au-delà de sa réalité. ?Spécialisé dans les portraits historiés inspirés par les sujets historiques et mythologiques, il était aussi très admiré en dehors de la France et Louis Maximilien de Bavière lui commanda une série de portraits qui font partie de la Galerie des Beautés du Château de Nymphenburg, près de Munich. ?Il portraitura Marie-Anne Christine de Bavière, Mademoiselle de Blois, la Duchesse de Berry, Mademoiselle de Monaco, Le Duc de Bretagne et bien d'autres, contribuant à l'évolution du Portrait du XVIIe siècle vers la perception plus galante de cet exercice au XVIIIe siècle.
Notre avis :
Peintre des princesses, Pierre Gobert nous livre ici un rare et inédit portrait de Marie Elisabeth d’Orléans.
Car s’il a multiplié les portraits de Mesdemoiselles de Charolais, de Clermont, de Sens, de Beaujolais, de la princesse de Conti et des autres petites-filles de Louis XIV par leurs mères qui se ressemblent toutes, il s’agit bien ici de la duchesse de Berry.
Elle est reconnaissable par ses yeux bleus et son nez caractéristique des bourbons mais aussi par comparaison avec deux autres portraits d’elle par Gobert, dont un ou elle prend la même pose avec l’éventail, dans la même salle au sol à damier.
Ce type de portrait est extrêmement rare de nos jours et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord pour le coût astronomique que cela représentait de posséder un esclave; en effet si quelques riches familles Bordelaises ou Nantaises possédaient des domestiques noirs, cette pratique fût en grande partie réservée à l’élite de la noblesse Parisienne.
La majorité de ces tableaux ont été détruit par les descendants après l’abolition de l’esclavage.
Les quelques tableaux de ce type qui nous sont parvenus, on parle de quelques dizaines, appartiennent majoritairement à des collections publiques.
On peut citer par exemple des exemplaires au musée des Ducs de Bretagne ou au musée du nouveau monde de la Rochelle.
Ce dernier musée a d’ailleurs organisé une exposition sur le sujet il y a quelques années ; (être noir en France au XVIII ème siècle, 21 Avril au 12 Juillet 2010).
Retrouvé dans une succession du Val de Loire, berceau historique de la famille d’Orléans, le tableau que nous présentons est un rare et émouvant témoignage de la mode des domestiques noirs au 18 ème siècle.
Retrouver le mobilier ou les objets d''art similaires à « La duchesse de Berry avec son page, atelier de Pierre Gobert vers 1715 » présenté par Franck Baptiste Provence, antiquaire à L'isle-sur-La-Sorgue dans la catégorie Tableaux XVIIIe siècle Régence, Tableaux et dessins.